4ur3lia, alias Aurélia Durand, est une artiste graphique de 28 ans, métisse d’origine française et ivoirienne, dont le talent a été découvert grâce aux réseaux sociaux par la visibilité donnée par son travail aux personnes de couleurs. Après avoir vécue à la Réunion et en banlieue parisienne, ses études de design la mènent au Danemark lors d’un échange Erasmus en design produit à la Danish Royal Academy of Arts à Copenhague. Rencontre.
De ses années vécues à la Réunion, elle retient la culture métissée, entre influences françaises, africaines, indiennes et chinoises, la richesse des couleurs et des saveurs. L’opposé en somme de l’image que l’on se fait du Danemark, pays nordique réputé pour son design minimaliste, épuré et fonctionnel. Paradoxalement si cet aspect l’avait initialement attirée, c’est ce qui va l’amener à s’en démarquer.
Elle débute sa carrière professionnelle en tant que designer produit auprès d’entreprises de mobilier où le manque de couleurs, ainsi que l’hiver danois, pèse sur son moral. Le hygge, cet art de vivre si cher aux danois où l’on se contente de qu’on a, de ses proches, dans une ambiance cocooning pour survivre à l’hiver, où la nuit tombe à 15 heures, ne fait pas effet. Les notions de solidarité et de partage censées accompagner le hygge sont subtiles lorsqu’on est étrangère puisque force est de constater que les Danois ont la fâcheuse tendance de rester entre eux. La plupart des amis d’Aurélia sont blancs et rarement danois d’origine.
En cherchant des événements pour personnes de couleurs, elle rencontre une communauté qui existe bel et bien, mais qui manque de visibilité. Elle se lance dans la création avec pour objectif de représenter ces personnes et sa perception du monde qui l’entoure. Elle vise plus spécifiquement le milieu artistique, domaine où aujourd’hui encore il y a une sous-représentation des personnes de couleurs dans les études artistiques mais aussi dans les expositions. De ses rencontres avec d’autres personnes de couleurs, elle apprend à se réapproprier son métissage, elle qui ne connaît pas la culture ivoirienne pour n’y avoir jamais vécu.
Or ce métissage elle le porte visuellement de par son apparence physique. Si aujourd’hui elle le vit très bien, ça n’a pas toujours été le cas. Enfant, elle a été victime de racisme, on lui a fait des remarques sur son physique, au point d’être comparée à un singe. Elle a d’ailleurs longtemps cru que porter un afro n’était pas socialement acceptable, que c’était sale car dans les médias les femmes noires ne montraient pas leur chevelure dans son état originel et faisaient en sorte de correspondre aux canons de beauté des blancs. Consciente aujourd’hui que tout cela s’est construit depuis l’époque coloniale, elle essaye via son compte Instagram, grâce auquel elle s’est fait connaître, de transmettre une autre image de la beauté.
Elle y dénonce l’objectivation, la sexualisation et l’exotisation des femmes. Elle met en avant des femmes fières de leurs origines et engagées telles que Marielle Franco, Nina Simone, Aïssa Maïga, Solange. Sa signature est de mettre volontairement en avant l’afro, le noir comme couleur de peau, tout en créant du contraste avec des couleurs pop des années 60 pour donner une force graphique supplémentaire à son travail.
Elle aime particulièrement travailler sur des personnages jeunes, fiers de leur couleur de peau. Cela s’inscrit dans sa volonté de voir plus de femmes noires dans les médias afin de créer plus de diversité dans le champ de l’illustration. Selon elle, plus les personnes de couleurs parleront d’elles, moins les médias en donneront une vision erronée pour vivre dans une société plus harmonieuse.
Artiste multi-talentueuse, Aurélia réalise des posters, des peintures, des illustrations pour des livres ou sur support digital, des animations pour des films ou clips musicaux, mais aussi des t-shirts “vibrant afro”. Elle donne aussi des cours d’animation sur Skillshare. Elle a également lancé sa marque, “AUROS by Aurélia”, de peignes afro engagés aux motifs wax en hommage à ce symbole de lutte pour les droits civiques et d’affirmation culturelle des personnes noires dans les années 70.
Parce qu’en 2018 il est encore difficile de vivre de son art, vous pouvez soutenir Aur3lia sur la plateforme Patreon, vous donnez ce que vous voulez en échange de contreparties sympas de l’artiste : https://www.patreon.com/aureliadurand
Ce petit coup de pouce lui permettra de continuer son travail d’illustration et d’animation, de le partager sur les réseaux sociaux, de préparer des expos et de venir à la rencontre de ses soutiens. D’ailleurs sa première exposition parisienne est prévue le 5 décembre au Bar à Bulles dans le cadre des ARTY AFTERWORK de Reines des Temps Modernes où vous aurez l’occasion de la rencontrer en personne et qui sait peut-être même de lui acheter une de ses œuvres. Si vous ne pouvez pas vous déplacer à Paris il vous est également possible d’acheter en ligne.
Prochaine expo d’Aur3lia le 5 décembre au Bar à Bulles, 4Bis Cité Véron, 75018 Paris
Event Facebook : https://www.facebook.com/events/260333037999027/