L’art dans le féminisme et vice-versa.

Jeudi soir, dans le cadre du festival Jerk Off, se tenait une conférence interactive sur le sujet. Voici un petit condensé de la soirée. Un peu comme si vous y étiez, la collation en moins.

Commençons par un petit dessin tout mignon qui en plus d’acter mon talent de graphiste, égaiera votre œil attendri en cette journée de veille de messe ou de lendemain de cuite.

C’est précisément de cette zone bleue dont il a été question.Dix spécialistes : journalistes, performeur(se)s, plasticien(ne)s, historie(ne)s se sont prêté-e-s au jeu de la délimitation le temps de 5 workshops. Entre Juillet et Septembre, ils se sont attelé-e-s à une réflexion commune. Et le moins qu’on puisse dire c’est qu’au vue des questions qu’ils ont passées en revue, ils n’ont pas dû beaucoup chômer : Jusqu’à quand faudra-t-il être féministe ? À partir de quand s’arrête un mouvement d’émancipation ? Est-ce que je peux être une femme et ne pas être féministe ? Comment faut-il être féministe ? Radicalement ou juste essentiellement ? Comment un homme peut-il exprimer son féminisme ? Jusqu’où faut-il être féministe ?

 

La conférence n’avait pas pour but de répondre aux questions. En deux heures, ça aurait été de toute façon impossible. Valérie Thomas (Artiste/performance/théâtre/féministe) en maîtresse de cérémonie a surtout exposé les questionnements qui ont jalonné les ateliers.
Tout au long de sa conférence performative, les pancartes ont défilé. Certaines ont atterri un temps par terre. D’autres, plus chanceuses, ont retrouvé leur place illico presto. On se serait cru au restaurant un soir de gourmandise. Entrées, plats, desserts. C’était consistant. C’était surtout, comme elle se plaisait à le répéter, glissant.

Glissant, parce que d’abord ça vient d’où le féminisme ? Qui a inventé ce mot ? Eh bien, j’ai appris, un peu amusée par l’absurdité de l’origine, qu’au départ, le terme qualifiait de jeunes garçons atteints de tuberculose et qui en plus –comme si ce n’était pas suffisant- présentaient des signes de féminité. Soit. Un peu plus tard, le sieur Dumas usa du mot dans un pamphlet sur l’urgente nécessité de châtier les femmes adultères. Le mot « féminisme » entrera finalement et de plain-pied dans le champ politique grâce à celle qu’on surnommait à l’époque « la suffragette française ». Grâce à Hubertine Auclert.

Ok. Mais du coup re-blocage. On sait à peu près d’où ça vient. Mais au fait, le féminisme, ça produit quoi ? A cette étape de la réflexion, les dix participant-e-s ont posé la question à Nicole Fernandez Ferrer (Déléguée générale du Centre Audiovisuel Simone de Beauvoir). Une question en trois temps : le féminisme a-t-il produit de l’art ? L’art a-t-il produit du féminisme ? L’entrée des femmes dans l’art a-t-elle servi l’Egalité ?

 

Nicole Fernandez leur a proposé un corpus de films/vidéos. 12 au total. Elles ont en retenu 5. Après 15 minutes de recherche acharnée sur internet, j’en suis arrivée à la conclusion, certes hâtive, qu’elles n’y sont pas. Dans le désordre, on a vu « Maledictines », une vidéo expérimentale en noir et blanc de 1975… euh, comment dire, assez spéciale. On a vu un film de Jacqueline Veuve sur une prof de français aux Etats-Unis dans les années 70, qui apprend le karaté et qui va au cinéma toute seule depuis qu’elle a compris qu’elle n’avait pas besoin d’un homme pour le faire. On a vu une vidéo de 2 min de Mihee-Nathalie Lemoine. On s’est bien marré en regardant Vivian Ostrovsky nous raconter des vacances entre femmes en 16 mm dans « Allers-Venues ». Mais surtout, il y eut « Inês » de Delphine Seyrig (1974). Franchement bouleversant. Inês (Etienne Romeu) du prénom d’une jeune femme emprisonnée, torturée et violée au Brésil au moment de la dictature.

En bonus, voici une playlist concoctée pour l’occas’ et qui regroupe 23 performances féministes d’un peu partout dans le monde. Enjoy.

Photo : Valérie Thomas

Rania