Repris par Beyoncé dans Flawless, visionné plus de deux millions de fois sur Youtube, le discours de l’auteure nigériane Chimamanda Ngozi Adichie est paru dans un livre intitulé Nous sommes tous des féministes (We should all be feminists, en anglais). Ce manifeste, tout juste publié en Suède, sera bientôt entre les mains de tous les ados suédois, a annoncé le Swedish Women’s Lobby. Portrait d’une auteure engagée.
Avant d’être un best seller, c’est à l’origine un discours de trente minutes, prononcé à Londres lors d’une conférence TED. Dans ce discours, Chimamanda Ngozi Adochie expose de manière simple mais percutante les inégalités entre les sexes qui persistent encore et toujours dans notre société. Les mots employés par Adichie dans ses écrits sont importants. S’il s’agit avant tout d’une lutte pour l’équité entre tous, ôter le mot féministe de ce combat reviendrait à nier la base du problème.
L’auteure nigérienne se définit par ailleurs comme une « Happy Feminist« , en réaction à une vision négative et caricaturale du féminisme et de ses défenseurs, pourtant bien répandue : la féministe par défaut car ayant échoué à trouver un mari ; la féministe comme nourrissant une haine profonde de l’homme ; la féministe comme figure purement occidentale et blanche ; etc…
À un moment j’étais une Féministe Heureuse Qui Ne Déteste Pas Les Hommes et Qui Aime Porter Du Rouge à Lèvres et des Talons Mais Pour Elle Même et Non Pas Pour Le Regard Masculin.
Le discours de Chimamanda Ngozi Adichie est claire sur ses intentions : il s’agit d’aspirer à l’égalité, d’en finir avec les idées reçues et les limites qu’on impose depuis des siècles aux femmes depuis leur naissance : « Un monde où les hommes et les femmes seront plus heureux et plus honnêtes envers eux-mêmes. » Or, il s’agit également de gommer le cadre tout aussi serré qui englobe la construction de l’identité masculine, basée selon elle sur la virilité et sur la peur de toute vulnérabilité ou aveu de faiblesse.
En bref, Adichie prône un féminisme nécessaire et salutaire à tous, pour une construction moins oppressante de l’identité des genres. Un féminisme qui mettrait davantage en lumière le fait que notre expérience du monde, de la société, est intrinsèquement liée aux spécificités de nos milieux : est-ce que je vivrais telle ou telle situation de la même manière si j’étais une femme / un homme ?
L’auteure a compris que pour être gagnée, la bataille nécessite que tous, hommes et femmes, se sentent concernés. Si les femmes en sont les grandes perdantes, la construction de la figure de l’homme à travers ces rapports inégaux est, elle aussi, limitée. Donner un exemplaire de cet ouvrage à chaque suédois de 16 ans, pourrait bien changer la donne…
À quand une initiative similaire en France ?
Nous sommes tous des féministes, de Chimamanda Ngozi Adichie, aux Éd. Gallimard dans la collection Folio 2 €, 2 euros.
© Éditions Gallimard, 2015 pour la traduction française de NOUS SOMMES TOUS DES FÉMINISTES Traduit de l’anglais (Nigeria) par Sylvie Schneiter