Georgia c’est la nouvelle pouliche made in Britain de Domino Record. Batterie très énervée, rythmique inspirée, Georgia est une apnée de quelques minutes dans l’essence de la pop industrielle, du post-punk et du grime saturé. Impossible donc pour le festival Les Femmes s’en Mêlent de passer à côté de ce pur produit londonien d’à peine 22 ans, batteuse, ancienne footballeuse et fan de Missy Elliot. Rendez-vous pour la closing party le 2 avril au Trabendo. En attendant, interview !
Tu t’appelles Georgia Barnes et tu as choisi ton prénom comme nom de scène, pourquoi ?
Bien, c’est mon prénom justement, et ça me semblait plutôt approprié de l’utiliser parce que c’est moi qui écrit et produit ma musique. Je n’avais pas envie d’être « quelqu’un d’autre »
Tu as commencé quand la musique d’ailleurs?
J’ai commencé par jouer dans des groupes avec mes ami(e)s, très tôt. J’ai appris à jouer tout un tas d’instruments à l’époque et puis au bout d’un moment j’ai commencé à écrire mes propres trucs. Un jour quelqu’un m’a montré comment utiliser un enregistreur multipistes. J’avais 16 ans. Et là tout s’est enchaîné. J’ai commencé à produire mes sons, ma musique. J’ai tout de suite adoré ça.
Mais c’est surtout la batterie qui t’a conduit là où tu es non ?
Oui, j’ai joué pour pas mal de groupes, dont Kate Tempest et Kwes, et ce n’est qu’il y a environ deux ans que j’ai décidé de me lancer réellement en solo. Je crois qu’au fond de moi, même si j’ai beaucoup joué dans des groupes, j’ai toujours voulu être en solo ; depuis que je suis enfant en fait ! J’adore jouer de la batterie pour les autres, mais je pense que ce qui me fait m’épanouir le plus, c’est de jouer pour moi-même.
C’est pas traumatisant de passer au premier plan d’un coup, en particulier sur scène ?
Je suis quelqu’un de très anxieux. Je suis toujours un peu paniquée avant de rentrer sur scène, depuis toujours. Mais le stress disparaît une fois que je suis dedans, et je finis par me sentir complètement à l’aise.
Ta musique est nourrie de pas mal d’influences diverses, mais j’ai noté la présence du grime, tu peux m’en dire plus ?
Tu sais, je viens de Londres. Mon intérêt pour le grime me colle à la peau depuis mes plus jeunes années ; j’aime sa sonorité agressive, la façon dont un MC pose ses mots, ça me touche, ça résonne en moi. Puis mes ami(e)s sont aussi de grands fans de grime, donc je baigne dedans de A à Z et depuis lontemps.
On parle de plus en plus du grime depuis quelques années, tu ne trouves pas ?
Oui, je suis si contente que cette musique ait enfin atteint les US ! Nos MC sont enfin reconnus à leur juste valeur, c’est la plus belle phase de leur vie, c’est certain, je suis ravie pour eux, c’est mérité !
Un artiste que tu chéris en particulier ?
Je dirais Stormzy.
Ta musique, ce serait la BO de quel film ?
Question difficile ! Parce qu’en fait, je m’inspire beaucoup des films que je vois pour composer ma musique. Mais je pense qu’un film de Danny Boyle serait parfait ! La Plage ou Trainspotting. J’adore la façon dont il utilise la musique dans ses films. Dans une autre vie, j’aimerais être un compositeur japonais et faire de la musique uniquement pour des films d’animation. Ce serait génial !
Le track phare de ton album, Move Systems, il vient d’où, d’un film ?
Non, je pense juste que les britanniques sont de plus en plus fatigués, lassés du système politique actuel. Move Systems est une espèce de chanson un peu punk dans laquelle j’encourage les gens à la rébellion, à la prise de conscience et de pouvoir. D’où la batterie qui prédomine, je voulais quelque chose de puissant et rugissant, je voulais que la batterie déchire, ravage le « système ».
En parlant de système, tu penses quoi de l’industrie musicale telle qu’elle est aujourd’hui ? Plutôt incluante ou excluante pour les artistes femmes ?
C’est encore une question difficile (sourire) car je ne me suis jamais pensée en termes de genre. Je me suis toujours posé des défis sans faire attention au reste. Et c’est vrai que le fait de faire de la batterie m’a aidé à combattre les stéréotypes dont sont victimes les femmes en général, et ça m’a forcé à devenir plus compétitive, pour me mesurer aux mecs. J’admets donc qu’une part de moi voulait être « reconnue » en tant que femme, même si je voulais surtout que l’on me voie comme un super musicien avant tout. Je pense qu’il faut absolument que les femmes comme les hommes puissent avoir la liberté d’être qui ils veulent être et de s’exprimer comme ils le veulent. Le fait que tu me poses cette question aujourd’hui me fait réaliser que nous n’avons justement pas encore vraiment atteint ce stade.
Tu penses qu’on va l’attendre ce stade ?
J’espère. Ce sera difficile, mais le monde de la musique est de toute façons très dur, un point c’est tout.
Une héroïne ?
Sans hésiter, Missy Elliott.
Credit photo: Laura Coulson